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Jean Patrick Beaufreton
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La première version écrite de l'aventure de Robert le Diable date du XII° siècle. Le Dominicain Étienne de Bourbon en fait un exemplum. Les Croniques de Normandie s'ouvrent sur la biographie de ce héros. Pourtant aujourd'hui encore, les rumeurs sont nombreuses et contradictoires autour du personnage.
Puisant à la source première, Jean-Patrick Beaufreton a composé en 2000 un spectacle intitulé « L'épopée de Robert le Diable ».
Tel un troubadour médiéval, seul sur scène, il interprétait tous les personnages : le duc, la duchesse, Robert, le pape, l'ermite, l'empereur et la princesse amoureuse. Lumières, bruitages, brefs poèmes contemporains à la manière médiévale, musiques d'époque...
Depuis, le conteur s'est tu, le texte s'est endormi. Aujourd'hui, il reprend vie pour être lu comme un monologue à transmettre avec passion et élan. -
Après la mort du roi Charles V, les régents du jeune successeur cherchent à rétablir des impôts interrompus par le défunt. Les Rouennais courent à la charte aux Normands qui prévoit : « Le roi ne lèvera en Normandie que les impôts ordinaires » et à la charte de Philippe-Auguste qui ajoute que les Rouennais ne versent pas d'impôt sur le vin.
On leur rétorque que les aides ne sont pas un impôt ordinaire, et que le régent ne veut taxer que le vin consommé dans Rouen. Les chartes semblent violées.
La révolte gronde... -
Février 1768, Marie et Mathieu sont fiers de leur fils de cinq ans, Mathieu lui aussi, malin et malicieux ! En revenant de chez Jacques, son copain tonnelier qui sait composer et clamer des poèmes, le père songe à l'hiver rigoureux, à la récolte misérable, à la vie du village.
Il trouve utile d'apprendre à lire à son fiston. Marie de son côté pense que leur garçon est encore jeune et encourage Mathieu à lui enseigner des choses utiles : aider aux champs, affronter l'existence pauvre. Il convient que les temps sont rudes, mais les enfants jouent et les parents s'aiment, c'est déjà beaucoup !
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En ce temps-là, les minoteries industrielles n'avaient pas envahi le pays, les nombreux artisans vivaient de leur métier. Au-dessus de chaque colline, le long de chaque rivière, les moulins écrasaient le blé, aidés par le vent ou par le courant.
- Marc, tu es en âge de trouver une femme et l'installer dans le moulin de ta famille.
- J'irai au prochain bal et j'espère convaincre Fleur... -
Geneviève de Saint-Martin n'imaginait pas connaître le sort des femmes de son village. Depuis octobre 1914, il ne se passait pas un mois sans la visite des gendarmes en mairie pour annoncer une triste nouvelle.
Elle n'avait aucun parent sous les drapeaux ; sa seule et lointaine connaissance, Jacques Sablier, était médecin dans un hôpital auxiliaire, loin des lignes, utile à la patrie, voire indispensable.
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M. Placide, parlementaire d'une circonscription lointaine, s'interrompt. Une maladie l'a empêché de siéger à la capitale pendant deux mois. L'élu, connu de ses seuls concitoyens provinciaux, revient avec une pensée rencontrée quelque part, une graine germée on ne sait où, une réflexion entendue loin des palais de la République.
Un électeur lui avait-il soufflé cette utopie ou l'avait-il perçue dans un éclair de sérénité ? Créer une nouvelle sorte de modèle de gouvernance ? Finis le demos des grecs, place au populos des latins.
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Pour occuper un week-end annoncé comme pluvieux, Justine s'était fixé une occupation utile : remplir son dossier de concours. Cette épreuve obligatoire lui offrait l'occasion inespérée, de se pencher sur elle-même, sa carrière et son avenir.
Dès la porte franchie, Justine trouva le jury impressionnant au premier coup d'oeil. Seul l'homme à droite de la présidente paraissait jeune, très jeune même, l'allure d'un étudiant attardé.
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Mathurin est un garçon à la vie exemplaire : les amis de ses parents le citent en exemple.
Mathurin a un diplôme, comme beaucoup de jeunes de sa génération ; il a un emploi, comme tous les pistonnés par leur paternel ; il habite chez ses parents, et cela rassure ceux qui redoutent le départ de leurs enfants du cocon familial. Ce qui est moins visible, moins exhibé, c'est le petit coeur de Mathurin, ses souffrances intimes, ses amours platoniques sans lendemain. Mathurin rêve en secret d'une donzelle pour le restant de ses jours, mais les jours défilent plus vite que les nymphettes entre ses bras. -
Ce matin, juste après l'ouverture, les boîtes à bonbons ont décollé de l'étagère dans la boulangerie, et elles ont volé en l'air. Le maire tenait son explication : le boulanger farceur draguait son employée naïve. Rien d'autre à chercher. Il se souvint que son fils fréquentait aussi cette Nicole ; il l'interrogerait et serait mieux informé que le village, un peu crédule à ses yeux. Si la gendarmerie ouvrait une enquête, le maire avertirait le brigadier d'aller tâter dans cette direction.
Mais les idées préconçues se heurtent souvent à la réalité plus simple et étonnante, surtout quand les sentiments se révèlent plus forts que la raison.
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Les grands yeux clairs se tournaient vers le tribunal.
- Madame Leduc, rapportez-nous ce qui s'est passé chez le guérisseur.
La dame sortit de sa torpeur :
- Je suis allée voir monsieur Géraud parce que, avec mon mari, ça n'allait pas fort... Il m'a écoutée. Je lui en disais un peu. Et comme je me sentais bien, je lui en ai dit davantage. Des trucs que je disais à personne. Il est venu s'asseoir à côté de moi, m'a caressé la joue, a essuyé mes larmes, m'a pris la main. Il m'a demandé où mon corps se troublait le plus... -
Plus qu'une tradition, un véritable rendez-vous. Depuis le décès de grand-père Robert, grand-mère Hélène, appelée Mémélène, réunissait ses enfants et petits enfants. Parcourir la route qui menait chez ma grand-mère était un plaisir. Je me faisais une joie de retrouver mon oncle Jacquot, rondouillard et plaisantin, et Tata Toinette qui me couvraient de baisers, de câlins, de tendresses. Mon oncle ne ressemblait en rien à sa soeur, la tante Alice : grande, sèche, un chignon sur le sommet de la caboche où elle boudinait et tortillait ses cheveux.
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Prisca et Sébastien sont heureux d'emménager dans leur maison : fini la vie en cage, le bruit des voisins, le tohu-bohu des voitures sous leur fenêtre. La maison qu'ils ont achetée est dans une ruelle en bordure d'une ancienne église abandonnée depuis belle lurette.
La nuit, un bruit se fait entendre. Toutes les nuits, le même bruit... À défaut d'en trouver eux-mêmes l'explication, ils invitent les voisins pour le verre de l'amitié, ce sont des anciens qui ont toujours vécu dans le quartier. -
Isabelle et Auguste menaient une vie sans éclats, les cordons de la bourse serrés : Auguste suivait les recettes et surtout les dépenses. Ensemble ils regardaient une année remplacer la précédente.
- Dans mon cercueil très ordinaire, dit un jour Auguste, au plus bas prix, tu placeras ma boîte en fer, avec tout notre pécule, sans en retirer un seul centime.
Isabelle eut du mal à marmotter quelques mots : je te promets... -
Pour avoir été le seul à secourir le roi et son épouse, l'étranger est accueilli dans l'intimité du souverain. Pourtant, sur ordre royal, il se retrouve dans la forteresse de Gisors, enfermé dans un sombre cachot aux parois humides. Avec l'espoir de rejoindre son amante, Nicolas Poussin repère les pierres de sa cellule, leur place, leur nature ; aussitôt il songe à sculpter les murs jusqu'à l'étroite lucarne. Toutefois, le chef de la garnison remarque le clou manquant à la porte du cachot, il ordonne de le retrouver sur-le-champ et de le remettre à sa place illico...
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Nous venions de rentrer de vacances en famille, l'été se prolongeait. Mon épouse finissait de ranger les derniers bagages ; je passais la tondeuse. La routine du français moyen, en quelque sorte.
Tout à coup, j'aperçus mon épouse sur la terrasse mimer que l'appel était pour moi. La voix n'était pas étrangère, les intonations surtout. J'hésitais à croire à cet appel : celui du grand amour qui n'avait pas fleuri, de la fille, avec qui j'avais rompu, en bonne intelligence, sans nous fâcher, juste en nous éloignant. -
La plus chère tradition de Mamette est de réunir la descendance au grand complet le dimanche entre la fête de Noël et le Nouvel an : ses enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants, pas un ne manque à l'appel. Pour rien au monde, Mamette ne dérogerait à cette coutume ; c'est sa Fête, avec un grand adjectif possessif et une immense majuscule.
Quelques descendants, sa fille en tête, songeaient à la décharger de cette corvée annuelle, jugée trop lourde pour son âge. Ils auraient souhaité lui réserver une surprise et organiser le repas complet pour la si longue tablée. -
- Tu verras, ma fille ! avec le gîte, ça te fera un complément de revenus. Et tu rencontreras du monde, tu te sentiras moins seule.
Pourtant Véronique avait des journées bien remplies : les bêtes, les machines, les semailles ou les récoltes selon les saisons.
Blaise était embarrassé. Sous le sapin de Noël, il trouva une boite-cadeau : choisir un séjour dans un des quatre-vingts gîtes ruraux partenaires.
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Grégoire est un brave gars ; ses parents sont des paysans, qui cultivent leurs terres à côté de Trun et s'occupent bien de leurs bêtes. Grégoire va sur ses vingt-cinq ans. Ce n'est pas un gars à courir les filles ; il est sérieux et propre ! Ses parents s'inquiètent. Ils commencent à prendre de l'âge et se demandent ce que va devenir la ferme, quand ils ne seront plus là.
- Dimanche, y a bal au café ? Eh bien, tu repères une fille qui te plaît, tu lui proposes de danser avec elle et tu lui parles de la ferme... Surtout tu lui dis que t'aurais envie de faire des enfants avec elle...
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Les coquetières allaient autrefois ramasser les coquillages dans les sables de la baie du Mont-Saint-Michel. En mai 1825, un banc de brouillard a surpris une équipée ; il a voilé le chemin du retour, il a désorienté les hommes les plus expérimentés. Par miracle, ils revinrent sur la rive, sauf trois jeunes filles disparues.
Sous la plume du curé de la paroisse, revivez l'aventure des coquetières de Roz-sur-Coënon, les croyances de l'époque, l'espoir des parents plongés dans l'incertitude, le dénouement et l'organisation souhaitée alors pour éviter le renouvellement de tels drames. Les noms de lieux et de personnes sont ceux retrouvés dans les archives consultées.
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Que chercher dans l'amour ? Nicolas a rencontré l'âme-soeur en la personne d'Élise. Leur première rencontre se déroule dans une soirée où Nicolas brille par son excès en Irish-coffees ; le lendemain, Élise s'incruste en protectrice zélée. Ils prennent l'habitude de passer des soirées au restaurant, au cinéma, à la piscine. Rien d'original ou d'inquiétant.
Mais Nicolas n'en peut plus : Élise est trop grande, trop belle, trop intelligente, trop parfaite, trop sensible, trop en tout. Il s'épuise et souhaite trouver le moyen de lui faire comprendre son désarroi.
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Gilles et Bertille ont vécu une existence tranquille : des carrières satisfaisantes, l'ascension sociale. Leur seul regret : ne pas avoir d'enfant, la nature s'est montrée injuste à leur égard et les services sociaux incompréhensibles. Pour s'occuper, ils aident les associations où ils sont appréciés.
Un soir, on les sollicite pour accueillir dans l'urgence un enfant dont la maman est hospitalisée. Comment refuser ? Petit à petit, le couple réveille la tendresse du garçon et apprend son histoire. Eux qui n'ont jamais eu la possibilité, ni le droit d'avoir un enfant, sentent battre leurs vieux coeurs.
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Aux yeux de certains, la Normandie semble terre de pommiers, chaumières et vaches, sous une pluie permanente. Un éditeur a confié la rédaction des guides aux « gens du pays », leur demandant d'axer l'attention sur ce qui se voit, du concret, du vérifiable ! Ainsi, le narrateur de la présente nouvelle s'est retrouvé à dépeindre sa région natale.
A-t-il subi les élans de son coeur ou s'est-il laissé emporter par son humour naturel ? L'auteur a exagéré quelques détails, grandi de petites choses et passé à côté d'autres. L'extrait de son guide régional donne envie d'en découvrir les autres pages, et de traîner ses guêtres sous les pommiers...
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Tous ceux qui séjournent dans cette maison éprouvent les mêmes illusions, mais jamais un seul n'a eu le courage de les comprendre et de les dominer. Aucun propriétaire n'est parvenu à conserver la demeure : certains sont décédés après quelques mois, d'autres y ont laissé leur fortune ou leur santé. Vous ne trouvez pas cela bizarre !
Il serait intéressant de dresser le tableau des propriétaires successifs, même éphémères. Par malheur, les historiens préfèrent s'attarder sur l'endroit ou les lieux, plus surprenants à leurs yeux, plus inquiétants pour les crédules. Les bâtiments, le parc et la rivière qui le traverse, où les curieux déambulent avec délectation, enferment mille secrets et autant de mystères...
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Le sire d'Amécourt appréciait que le monde fût conforme à ses souhaits. Alix avait l'apparence d'une fée. Sa taille, sa chevelure, ses traits composaient l'héritage reçu de sa mère, éteinte à sa naissance. Malgré les emportements du père, les prétendants s'annonçaient : ducs, barons et chevaliers se pressaient avec l'espoir de recevoir l'agrément du maître.
- Dites à ma fille Alix que je l'attends. Je lui fixerai les détails de sa journée !